Alice arrive au tribunal, un matin, avec ses deux enfants adolescents, Étienne et Lila. Ce n’est pas la première fois qu’ils y viennent, mais cette fois-ci est cruciale, car la garde des enfants par Alice est remise en cause. Mais à peine arrivés, Étienne s’enfuit et part se cacher, refusant tout contact avec son père...

Ce premier long métrage belge est un choc, signé Charlotte Devillers (ancienne professionnelle de la santé travaillant avec des victimes d’abus) et Arnaud Dufeys (jusque là documentariste), qui a obtenu une mention spéciale dans la section Perspectives du festival de Berlin 2025. 1h18 d’efficacité redoutable, de matière à réflexion, d’émotions fortes, le tout pour une forme la plus réaliste possible et d’une crédibilité imparable. On vous croit nous entraîne pendant plus d’une heure, en quasi temps réel, dans un huis-clos : le bureau d’une juge où des personnes ne font que parler, et pourtant, peu de films récents sont aussi haletants que celui-là. Constamment sobre (pas de caméra qui s’affole ou s’énerve), on est immédiatement happé et on vibre autant que devant un thriller. Charlotte Devillers et Arnaud Dufeys créent un rythme vivant, dynamique, doublé d’une écriture fine qui évite, par exemple, de placer du suspense sur la question de la culpabilité du père et la nature des faits reprochés. La tension, ici, se concentre sur la parole et surtout sur l’écoute. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si l’on y note l’apparente surdité de la justice, tout comme y est pointé le besoin de celle-ci de réentendre encore et encore les témoignages. La qualité de l’écoute est certainement le sujet central
du film, aussi bien celle des protagonistes du drame qui se joue sur l’écran que celle de nous autres, spectateurs, installés face à cet écran. Avec son habile économie de moyens, On vous croit donne tout son
sens au pouvoir de la parole et atteint ainsi chacun d’entre nous, nous confrontant en tant que citoyens/
spectateurs a des situations qui nous concernent tous, peu ou prou. Mais si les mots entendus sont aussi forts, c’est aussi grâce à la mise en scène constamment digne et à la force d’incarnation des actrices et acteurs. Face à l’art oratoire des juges et avocats (incarnés par de vrais professionnels), Myriem Akheddiou,
notamment aperçue à de nombreuses reprises chez les frères Dardenne ou encore, récemment, dans Rembrandt de Pierre Schoeller, accède ici à un premier rôle marquant dans lequel elle est aussi époustouflante que poignante de vérité.

JF