Commençons cette nouvelle saison cinématographique par des retrouvailles sous le signe de l'émotion et de la bonne humeur. Et pas n'importe lesquelles, car ce sont celles qui signent le retour de l'immense Aki Kaurismäki. Quand on a tant aimé, entre autres, Au loin s'en vont les nuages, Le Havre, L’Homme sans passé ou J'ai engagé un tueur, ce n'est pas rien que la promesse d'un plaisir sans pareil. Autant le dire tout de suite, le pari est très grandement tenu et Les Feuilles mortes s'impose d'ores et déjà comme un des sommets de l’œuvre du cinéaste.

Ansa et Holappa, deux personnes solitaires, vivent de petits boulots et se rencontrent, par hasard, une nuit à Helsinki. Ils souhaitent se revoir mais ils ne connaissent ni leurs noms, ni leurs adresses réciproques. Le tout se complique aussi de l'alcoolisme d'Holappa et de la perte d'un numéro de téléphone. Bref, la vie s'obstine à mettre des obstacles à franchir avant de pouvoir, peut-être, trouver le bonheur...

Les Feuilles mortes est à la fois une continuation et un renouvellement du cinéma d'Aki Kaurismäki. On y retrouve les décors, couleurs et lumières qui n'appartiennent qu'à lui, mais, pour la première fois, les rôles principaux sont incarnés par des nouveaux venus dans son univers et la rumeur du monde contemporain (la guerre en Ukraine via la radio, par exemple) semble plus prégnante qu'auparavant. On y retrouve aussi l'intelligence et l'attachement inconditionnel du cinéaste a des personnages écorchés, fragiles, mais dignes et forts d'une incroyable humanité.

Le cinéaste crée un univers qui mêle gravité et mélancolie, et même si on est bien en 2023, le film est quasi intemporel tant il se focalise non sur le superflu mais sur l'essentiel. C'est aussi une merveille de délicatesse et, surtout, d'humour. Malicieux, pince sans rire, Les Feuilles mortes nous emporte sur des cimes où se mêlent rires et larmes ; bref, faire autant de bien en 1h21, qui dit mieux ?