Il est tout d'abord réjouissant de constater que, du Canada, peut venir un film très critique sur le cours des choses économiques qui étranglent la planète. Nous ne sommes donc pas le petit village gaulois de la caricature. Bref, les spectateurs sortent de la salle soit très remontés contre le système, soit totalement accablés face à la puissance économique dont nous subissons la loi (le talon de fer disait Jack London).
Comme souvent avec ce genre de documentaires, sur le plan de la forme ça pêche effectivement un peu. Il y a une difficulté à rendre efficace le message. Les témoignages (fort riches) ont tendance à s'empiler et l'on passe, sans marquer de temps d'arrêt de la question des paradis fiscaux à celle de la finance en général en passant quelques sociétés habiles à jouer des avantages fiscaux. On en arrive un peu à quelque chose d'assez embrouillé et les images de phénomènes météo de nous aident pas vraiment à y voir plus clair. Il aurait, peut être été bénéfique de tirer des conclusions partielles illustrées par des schémas explicatifs qui ont le pouvoir de laisser des traces dans nos petits cerveaux exténués.
Sur le fond, on aurait bien aimé un zoom sur une société comme Total, un des champions français de l'optimisation fiscales dont le défunt PDG M de Margerie était un « intime » de M Valls. M Valls dont on remarquera, au passage, que son discours « pro business » tenu récemment à la City est quasiment calqué sur celui de son homologue conservateur britannique. Difficile dans ces conditions de ne pas confondre sa droite avec sa gauche ! Et l'on viendra ensuite déplorer la montée de l'abstention .
Autre critique sur le fond : le film a tendance à faire de la taxe Tobin, ici rebaptisée de manière savoureuse taxe Robin des Bois, l'alpha et l'oméga des politiques destinées à juguler paradis fiscaux et finance spéculative. C'est un peu court. Dans son excellent livre « Bancocratie », Eric Toussaint propose pas moins de 14 mesures pour remettre les choses à l'endroit. Je vous en recommande la lecture.
PS Je ne sais pas si c'est une impression fausse, mais les parlementaires anglo-saxons me semblent bien plus incisifs vis à vis des grandes multinationales de l'évasion fiscale que nos élus hexagonaux qui semblent souvent bien timides face aux puissants 1%.